La bataille de Millau...

Publié le par Christian Durand

La tramontane balayait de son souffle glacé toute la steppe entre La Couvertoirade et Millau. Et pourtant, à l'heure où blanchit la campagne, ils étaient tous là, les obscurs, les sans-grade, la jeune garde et les vétérans du Larzac, bien décidés à libérer Bové le Magnifique des griffes de la d'Jap ! (juge d'application des peines).


Le tribunal est benoîtement niché entre la rue de la Liberté et la Croix Rouge. Tous les commerces sont ouverts mais la rue est barrée par d'importantes forces de police, soit une dizaine de policiers municipaux. En face, trois cent justes, hommes, femmes, enfants et quelques chiens, qui déambulent paisiblement. Pour le moment. Un passant inquiet demande « qu'es aco ? » - On soutient Bové ! - Beauvais ? Mais ils sont même pas en seconde division ! » (authentique).

Nous allons donner l'assaut au Tribunal !
Miladiou !

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Trois cents mais pas deux pareils sous les bonnets et les polaires de rigueur. Les faucheurs volontaires et les anti-ogm forment le gros du bataillon. Quelques bergers et leurs bergères sympathisent avec des nains de jardin à la barbe fleurie. Pas mal d'antilibéraux dont beaucoup de fauchés involontaires. Les papés et les mamés échangent leurs souvenirs des années glorieuses, quand nous étions cent mille à La Cavalerie. De grosses larmes coulent sur les visages burinés.


La bière circule, les tartines de fromage se multiplient par magie, les chataignes brulantes fument dans les cornets, le vin bio est une affreuse piquette, ça sent bon le terroir - on dirait le Sud ! Bové prend la parole. Le bon peuple frémit, on attend le signal de l'assaut. L'équipe de rugby-con de la police municipale sécurise l'entrée, à quatre ils verrouillent les trois mètres du perron, une fliquette au milieu, même gabarit. Un géant de jardin au bonnet péruvien se plante devant elle, tel Don Quichotte devant les moulins. Ca sent la poudre.
 

Bové goguenard évoque ses nombreuses visites et rend hommage à l'hospitalité de l'endroit où il a toujours été bien traité. On lui prête l'intention de publier un Guide du Taulard où il comparerait les qualités de tous les commissariats, salles de garde à vue, mitards, parloirs, prisons, qu'il a fréquentés à son corps défendant. Il y distribuerait les étoiles, une, deux ou trois matraques, des bracelets dorés, selon le niveau.


Ils ne m'auront pas vivant, miladiou !
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Bové et Casque d'or, son avocate, se glissent entre les jambes des pandores et disparaissent dans le tribunal où des fenêtres inquiètes se sont ouvertes. Le bon peuple frémit (bis). Un demi-d'ouverture se glisse entre deux piliers et tambourine sur la porte. Nous voulons entrer - hurlent les nains de jardin qui montent à l'assaut de l'escalier gardé par les centaures. Un papy qui a du faire la résistance s'empare du calot d'un policier distrait. En un instant toutes les casquettes muncipales volent dans la foule. La plus belle est mise aux enchères.
 

En représailles, l'audacieuse fliquette s'empare du bonnet péruvien de l'imprudent Don Qui Chipotte. Le bon peuple gronde. Les flash crépitent. Les chiens hurlent. La tension est à son comble. On entend le bruit des tanks. Non, c'est le grill à chataignes qui s'est effondré. Et puis on s'aperçoit que tout le monde rigole, les flics, les nains de jardin, les toulousains, même la fliquette – qui est beaucoup plus jolie sans sa casquette qu'on lui rend. Le calme revient. Tournée générale.

 

Mais soudain une voiture de gendarmerie force le barrage municipal. La guerre des polices ? Deux képis en sortent (chic des képis) encadrant un gaillard menotté et titubant, le crane enturbanné. Un repris de justesse, en comparution immédiate. Aussitôt la foule : Libérez notre camarade Lepochtron !

Inquiet le képi en chef repart à la voiture, appelle Autorité – y a un barrage de police qui nous empêche de rentrer dans le tribunal ! Pas question d'entrouvrir le portail sinon trois cent nains de jardin s'engouffreraient dans l'enceinte de justice. Sursis pour le matraqué.

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 C'est alors que José ressort, couvert de sang ! Miladiou !

– mais non, c'est le rouge de l'émotion. La juge dont le tribunal est menacé par Rachida Dattila a décidé de ne rien décider sinon qu'il était urgent d'attendre. On-Na-Ga-Gné ! La peine sera convertie en jours-amendes. Mais le combat continue contre les ogm, la mal bouffe, l'OMC, la mondialisation... (chaque fois il oublie ma propriétaire).

 

Les chants occitans éclatent, pire que les polyphonies corses, la foule s'enfuit, les cafés se remplissent, les femmes enceintes soupirent, c'est le moment émouvant de l'échange des adresses, comme au Club Méd. Rendez-vous en décembre, d'ici là « Gardarem lou béret » et si Bové est menacé « Farem tot pétar ». Miladiou !


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Distribué par Mac Do, à Millau...


Du même auteur :

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Publié dans Luttes sociales

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